FRANCAFRIC/FRANçAFRIQUE
La France-Afrique est souvent présentée comme une relation d’égalité ou d’une main tendue par la France à l’Afrique. Pourtant les relations n’ont guère changé depuis les indépendances à partir de 1960 malgré les paroles des présidents sur la disparition de la françafrique. Les réalités migratoires démontrent que les richesses et le développement ne profitent qu’à une minorité : les richesses sont exploitées par des entreprises étrangères, souvent françaises, dont les bénéfices transitent par des paradis fiscaux.Les cartes et les fiches présentées ne sont qu’un aperçu d’une réalité où se mêlent les grandes entreprises, la politique et les militaires français.
Depuis plusieurs années des jeunes quittent l’Afrique par milliers, au péril de leur vie, beaucoup meurent dans le désert ou en Méditerranée, ou subissent l’exploitation, l’esclavage, les viols, les tortures et l’emprisonnement.
Beaucoup ne rejoindront jamais nos côtes et nos plages où nous aimons nous prélasser. Personne ne risque sa vie pour quitter son pays si il n’y est contraint. Le danger de cette «aventure» est connu de tous, tant en Europe qu’en Afrique. Les réseaux sociaux, qu’utilisent ceux qui ont réussi le voyage, ont certainement une influence pour les candidats à l'exil mais qui paraît insuffisante comparée aux risques encourus.
La misère est de loin la raison première qui pousse ces jeunes à risquer leur vie pour atteindre l’Eldorado, (une très grande majorité des migrations se font vers les pays limitrophes). A l’inverse, pour les investisseurs, entrepreneurs français, l’Eldorado c’est l’Afrique. Ce continent qui concentre tant de richesses semble n’offrir aucune perspective à sa jeunesse défavorisée et très nombreuse. 25 % de la population mondiale sera africaine en 2050.
On reproche souvent aux pays africains d’avoir des gouvernements corrompus. Ce constat amène à nous questionner :
Par qui sont-ils corrompus?
Quels sont les intérêts des entreprises françaises à investir en Afrique?
Quels sont les monopoles?
Que représente l’Aide au Développement? ....
Pourquoi dans certains pays les activités agricoles, minières, de logistiques, de communication, du tourisme, des banques... sont détenues par des investisseurs étrangers, pour certains français ? Comment les pays d’Afrique peuvent-ils se développer pour permettre à leur jeunesse de vivre, de s’épanouir dignement ?
Partage des richesses
Le développement, la richesse ne profitent qu’à une minorité. Beaucoup d’africains vivent dans la misère, c’est à dire en cumulant plusieurs facteurs de pauvreté (IPM, Indice de Pauvreté Multidimensionnelle): nourriture, logement dans les bidonvilles, manque d’accès à l’eau, à l’éducation, à la santé, à l’électricité, à un emploi viable... Pour beaucoup seule l’économie informelle et quelques cultures vivrières leur permettent de subsister, de survivre.
Il serait difficile d’évaluer clairement les intérêts français en Afrique, tant les entreprises se décomposent en filiales souvent domiciliées dans des paradis fiscaux. Le but n’est pas d’avoir un regard exhaustif sur une réalité économique mais de voir à travers quelques entreprises françaises le pouvoir économique et souvent politique qu’elles représentent pour ces pays.
La France fait partie des puissances engagées (Angleterre, USA, Chine...) dans la course à l’investissement sur un continent qui demeure l’un des meilleurs placements du monde avec des taux records de rentabilité de 14% annuel contre 7% pour la moyenne mondiale. L’Afrique demeure un eldorado économique!
Le rôle des entreprises françaises soutenues par l’État.
Parmi les dirigeants d’entreprises qui sont implantées en Afrique, 2 personnalités emblématiques apparaissent, 2 des plus grandes fortunes françaises : Pierre Castel (8ème fortune française avec 13,5 milliards €) et Vincent Bolloré (14ème, fortune française avec 5,8 milliards €) .
Pierre Castel détient le monopole des boissons gazeuses et des bières dans plus de 15 pays africains.
Vincent Bolloré est le leader du transport avec la société Bolloré Transport et Logistics, il est présent dans 46 pays d’Afrique.
Le groupe Total, fleuron de l’industrie française qui malgré la possession de capitaux internationaux ne demeure pas moins une entreprise soutenue par l’État français (par les Ministère des Affaires Étrangères, de l’économie...). Ces sociétés ne sont pas les seules, de nombreuses autres entreprises françaises investissent en Afrique : Bouygues, Orange, Groupe Accord, BNP, Société Générale (présente depuis 110 ans), Areva, Carrefour, La Compagnie Fruitière...
Certes il n’y a pas que des entreprises françaises qui convoitent les richesses africaines. Mais le passé colonial de la France leur garantit une puissance commerciale. La présence avant la décolonisation de groupes comme Total depuis 80 ans ou depuis 1947 pour Castel (qui racheta les «Brasseries et Glacières d’Indochine» entreprise coloniale qui deviendra Brasserie et Glacières Internationales), permet de préserver leurs intérêts par le soutien de l’armée ainsi que celui des gouvernements successifs français. La présence chinoise et américaine en Afrique profite aux entreprises françaises comme Bolloré pour le transport ou Total pour la distribution des carburants et Castel BGI qui désaltérera tant les africains que les travailleurs étrangers.
Afin de préserver ses intérêts économiques, le Ministère de l’Economie et des Finances propose des aides, prêts et conseils pour les investissements en Afrique des entreprises françaises. La France imprime encore le franc CFA (créé en 1945) utilisé dans 14 pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre, la Banque de France détenait ( jusqu’à juin 2021) la moitié des réserves d’or de ces pays. Elle est censée garantir un taux de change indexé sur l’euro ce qui permet d’être plus avantageux pour la France d’exporter vers ces pays qui eux se retrouvent pénalisés pour leur exportations car possédant une monnaie trop forte. Le Franc CFA devrait être prochainement remplacé par l’Eco (monnaie gérée par la Banque Européenne). Mais c’est sans illusions car les conseils d’administrations des banques africaines sont gérés en partie par des occidentaux (français, anglais...) qui gardent un pouvoir décisionnel important et qui indexera toujours la monnaie Eco sur l’Euro.
Détournement, spoliation des ressources
Malheureusement cet eldorado est conquis aux détriments des intérêts des populations : spoliation des ressources, expropriation, pollution, création d’emplois sous-payés avec des conditions de travail déplorables.... Les entreprises étrangères extraient les minerais à bas prix, louent ou achètent les terres arables qui seront cultivées pour l’exportation ou pour les carburant verts. Ces sociétés possèdent des monopoles dans des secteurs d’activités essentielles: l’agriculture, l’agroalimentaire, l’extraction et la distribution des minerais et hydrocarbures, le transport, la logistique, les communications, la construction BTP, le tourisme, la distribution...
La plupart des ressources d’Afrique sont vouées à l’exportation. Les produits finis ne sont pas usinés sur le continent, excepté le conditionnement des productions agricoles. Les noix de cajou, arachides, huile de palme partiront brut pour l’exportation, tout comme la majorité du pétrole sera raffinée en Europe.
Une partie des entreprises étrangères se tournent pourtant vers l’Afrique comme « continent consommateur », à l’instar du groupe Castel qui produit et distribue ses boissons gazeuses et bières directement en Afrique ou Total des lampes et kit solaire...
Conflits/ Réfugiés
L'Afrique est un continent dont plusieurs pays sont dans l'instabilité politique. Les guerres, les conflits et les crises créent des réfugiés qui vivent par millions dans les camps. La gestion des camps de réfugiés est un secteur producteur de profits pour les entreprises françaises comme pour l’obtention de contrats pour la surveillance technologique ou le gardiennage et l’identification des réfugiés. Les magasins des camps dans lesquels les réfugiés font leurs courses sont parfois gérées par des filiales de sociétés françaises. Les réfugiés reçoivent par le HCR (Haut commissariat aux Réfugiés) des cartes de crédits avec une somme déterminée à dépenser dans les magasins du camp, pour leurs achats de première nécessitée. En France des entreprises (Vinci, Véolia, Engie, Elior...) gèrent la construction, la restauration, l’entretien etc. des centres de rétentions où sont enfermés les réfugiés avant une probable expulsion ou un emprisonnement.
Les interventions militaires servent aussi de vitrine commerciale pour les «produits» de nos usines d’armement, (la France est le 3ème exportateur mondial d’armement) et permettent aussi aux militaires de vendre leur formations pour la gestion des conflits et des manifestations.
Résistance à la présence française / investissement déguisé en aide
Depuis des décennies des résistances à la présence française surviennent dans les pays des ex-colonies. Ces derniers mois, on observe de nombreux mouvements de protestations au Sénégal, au Mali, au Tchad... contre la présence des sociétés et militaires français, 60 ans après les indépendances.
Les milliards dépensés depuis des dizaines d’années, entre les interventions militaires et les aides aux développement, augmentent surtout la Dette des pays. L’Aide au développement depuis les années 1990 n’est certainement pas une solution mais plutôt une emprise. Ces sommes colossales investies auraient certainement de meilleures utilités que celles d’augmenter les bénéfices des entreprises qui dépouillent des peuples.
Ces grandes entreprises françaises investissent dans l'avenir sur le continent. En matière d’éducation des partenariats entre entreprises et universités permettent de former les élites africaines avec les préceptes du modèle économique ou des intérêts français. Comme si le développement ne pouvait être calqué que sur le modèle de nos sociétés. La France se targue d'apporter une aide à l'Afrique mais les Africains ont toutes les capacités et les ressources nécessaires pour se développer, si l’on cesse de les entraver, de les spolier.
D’autres relations égalitaires sont possibles
Les relations France-Afrique existent et existeront de plus en plus par la mixité des êtres, des histoires, des cultures. Ces relations sont le fait d’individus, de travailleurs, d’artistes qui vivent et voyagent entre les deux continents. Ces relations humaines qui s’inscrivent dans le temps, dans l’Histoire sont une richesse, construite en grande partie par et avec les millions de travailleurs africains. C’est cette relation qui mérite d’être entendue, d’être citée, celle qui est basée sur l’échange et non celle qui n’a d’intérêts que commerciaux, non cette France-Afrique des Sommets de Ministres et Chefs d’états, des voyages diplomatiques avec des généraux et des chefs d’entreprises qui arrivent en meute pour obtenir de juteux marchés. C’est cette France Afrique destructrice qui doit disparaître et laisser place à des rapports d’égalités et de respects mutuels.
Nous citoyens français avons du mal à saisir toute la complexité de cette situation. Notre bien-être et l’expansion de nos entreprises sont liés à la misère de ces peuples. La solidarité n’est pas simplement une aide à des pays lointains mais est une réalité des peuples d’Afrique qui nous concerne directement.
"Tine"
Les liens vers les articles ou les sites sont des sources qui permettent d’aller plus loin pour comprendre l’ampleur du déséquilibre des relations France-Afrique...
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